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Oklahoma Visual Arts Coalition (OVAC)

Le 15/02/2015 | Article n°24 | 2 commentaires | Laisser un commentaire

Mieux vaut tard que jamais !


C'est certain, mieux vaut tard que jamais, le voici enfin l'article sur mon lieu de stage ! Oui car ce stage est l'objet premier de mon expatriation en terre Oklahoman... en tout cas aux yeux des autorités ! Vous aurez compris que l'aventure va bien au delà et que d'autres raisons un peu moins professionnelles étaient aussi à l'origine de ce départ...


Depuis le début du mois d'octobre 2014 donc, je suis stagiaire au sein de l'Oklahoma Visual Arts Coalition, appelée aussi OVAC. C'est une non-profit organization, c'est à dire que son fonctionnement ressemble à celui de nos "associations de loi 1901" : elle mène ses actions sans but lucratif, est chapotée par un conseil d'administration (the board directors) et ses actions sont coordonnées par une équipe de cinq salariés (et quelques stagiaires!). OVAC existe depuis 1988 et a pour mission d'accompagner les artistes plasticiens habitants et travaillant dans tout l'Etat d'Oklahoma dans leur pratique. Cela s'effectue par la mise en place de work shop, d'expositions, par l'attribution de bourses, le recensement de tous les artistes membres dans une galerie virtuelle, et l'édition d'un magazine "Art Focus" qui parait tous les deux mois.


OVAC fonctionne sur la base du membership, c'est à dire que, artistes ou simples intéressés paient un abonnement annuel et bénéficient en retour : de la possibilité d'apparaitre sur la galerie virtuelle, d'obtenir des réductions sur les billets d'entrée des expositions, d'avoir un accès gratuit au magazine etc... Et du coup, ce membership, c'est la source première de financement de la structure. Car oui, nous sommes aux Etats-Unis ! Je n'irai pas vous faire un camembert comme je le faisais dans mes rapports de stage il fut un temps, ni vous dévoiler de chiffres d'ailleurs, mais le financement public pour la culture ici est... quasi nul ! Je ne me lancerai pas non plus dans une analyse historique des politiques culturelles aux Etats-Unis mais je peux en tout cas vous dire que ce n'est pas dans la culture américaine de financer l'Art par les impots des petits américains. Ce qui est bien américain cependant, c'est la philantropie! Et la philantropie aux Etats-Unis est avant tout quelque-chose de CULTUREL (au sens des us et coutumes, pas au sens artistique). Malgré toute mon ambition et même si les structures culturelles françaises se tournent de plus en plus vers le mécénat, ce n'est pas demain que je pourrais tenter d'imposer "le modèle de financement américain" pour la culture en France...


Et la philantropie ce n'est pas seulement l'affaire des grosses fondations, grosses entreprises ou de très riches particuliers, en effet des personnes plus "modestes" mais très investies dans la communauté artistique donnent de leurs petites (ou grosses) économies pour supporter une cause qui leur est chère. Si l'on regarde ça avec nos yeux de petits français cela parait empreint d'une générosité incroyable, non? Mais ce qu'il faut considérer aussi c'est la culture des communautés qui est ultra forte aux Etats-Unis. J'en avais brièvement parlé il me semble... On appartient à une communauté lorsque l'on choisit de se rendre dans tel ou tel club, telle ou telle église, lorsqu'on a été dans telle ou telle université, que nos enfants sont dans telle ou telle équipe sportive. Et comme vous le savez maintenant, on continue de supporter l'équipe de football de son université même quand on y est plus depuis des décennies, on continue de porter les couleurs de son université et pour certains on fait des dons à son université (comme si on n'avait pas assez dépensé pour y passer quelques années !). J'imagine bien que ce n'est pas le cas de tout le monde, qu'il y a des gens plus "isolés" qui sont assez indifférents à tout cela et ne se reconnaissent pas comme membre d'une communauté mais c'est quand même quelque-chose de fondamental dans le fonctionnement de nombreuses organisations. C'est grâce à l'existence de cette communauté artistique que le "membership" fonctionne et que les membres renouvellent leur adhésion année après année, et cette adhésion est bien plus qu'un abonnement que l'on prendrait dans un théâtre en France pour avoir accès à un plus grand nombre de spectacles et à un prix réduit. Et du coup cette communauté est un microcosme dont le "public" et les "acteurs" sont assez confondus, les personnes qui se rendent aux expos, dans les galeries sont bien souvent eux mêmes artistes ou collectionneurs, conservateurs, travaillant dans des organisations culturelles, mais aussi simples amateurs et de TOUS AGES (oui ici c'est fortement inter-générationnel!). Et je dois dire qu'en France dans le milieu culturel, on ne se permettrait jamais de parler de communauté, d'abord parce-qu'elles n'existent pas telles que celles que je cotoie ici mais surtout car on ne voudrait surtout pas parler d'une communauté artistique quand on cherche à élargir le public, et rendre la culture accessible à tous et que l'on fait des demandes de financement revendiquant cette mission-même, avec parfois un chouilla de "voilage de face" quand on regarde qui sont les gens dans le public de certaines Scènes Nationales ou festivals et que l'on reconnait toujours les mêmes têtes d'intellectuels. Bouuuuh Pauline qu'est-ce que tu dis pas là !!


Il me semble aussi qu'ici il y a un rapport un peu plus décomplexé à l'argent, même dans les "non-profit organization", on réfléchit à comment vendre des choses qui rapporteront de l'argent pour de nouveaux projets, cela ne veut pas dire qu'on ne prête pas attention aux questions d'accessibilité, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas écrit ! J'ai une petite anecdote à vous raconter à ce sujet d'ailleurs. D'abord contextualisons: chaque évènement ou programme organisé/mis en place par OVAC est chapoté par un "Committee" (sorte de comité) indépendant du bureau d'administration et de l'équipe de salariés et dont les membres sont différents pour chaque programme et sont tous bénévoles. Ainsi même si les idées de cadrage viennent de l'équipe salariée d'OVAC, ensuite les décisions sont prises collectivement par les membres de ce comité dont le nombre varie selon les projets, une petite dizaine ou une vingtaine. J'assiste donc à ces réunions mensuelles notamment pour l'organisation de l'exposition Momentum OKC qui aura lieu début mars. Et avant Noël, lors d'une de ces réunions, nous avons fait quelque-chose qui m'a vraiment étonnée. Chaque membre du comité devait appeler des amis, membres de la famille et personnes de la communauté artistique qu'il connait pour leur expliquer le projet et leur demander de faire un don, pouvant aller de 10 dollars à 1000 dollars et plus si plein de pognons. A chaque promesse de don on sonnait une petite clochette! Et la clochette a plutôt bien retentie car en 30 minutes nous avons obtenu 3 400 dollars. Vous ne trouvez pas cela dingue ? Moi oui, et j'étais pas hyper à l'aise car je ne savais pas à qui demander de l'argent, ni comment m'y prendre, alors j'ai fait semblant d'envoyer des textos pendant toute la demie-heure. Enfin voilà, tout cela pour dire que cela est possible sans financement publique parce-que la philantropie et parce-que la communauté ! Je ne dis pas que c'est ce que tout le monde devrait faire, ça reste discutable, bien entendu.

Mais alors je fais quoi moi dans tout ça ? Je veux dire à part envoyer des textos fictifs pendant les réunions ? Et bien jusqu'à aujourd'hui j'ai principalement travaillé sur la galerie virtuelle en ligne en lien avec les artistes membres, sur les archives et un petit peu sur la diffusion du magazine Art Focus, sur la récolte d'informations sur les opportunités d'expositions et de work shop pour élèves et étudiants dans le cadre d'une "high school e-news" (newsletter que l'on envoit régulièrement aux écoles). Et puis ensuite je m'affaire au petites tâches quotidiennes liées à l'actualisation du site internet, à la gestion des adhésions et des dons (money, money, money!). Et comme je suis définitivement une bloggeuse j'ai aussi écrit quelques petits posts (très courts, pas de quoi se vanter!) pour le blog de l'organisation. Aussi, pendant mes premiers mois on m'a gentiement proposé d'assister au work shop Artist Inc auquel avait participé Nicholas l'année dernière. Il s'agit d'un work shop de trois heures par semaine qui se concentre sur les aspects pratico-pratiques de la vie d'artiste: comment gérer son petit business, comment créer son site internet, comment estimer le prix de vente de ses oeuvres etc... bref ce que l'on apprend pas à l'école malheureusement. Cela m'a permis de découvrir et rencontrer pas mal de gens très sympas et inspirés ! Enfin voilà disons que je fais un petit peu de tout, je donne des coups de mains à tout le monde ce qui est bien car cela me donne une vision globale des activités, mais c'est aussi assez limité en termes de responsabilité car justement je ne fais que donner des coups de mains là où il y a des besoins, je n'ai pas MA mission à moi, pas de responsabilité, pas de deadline. Et il y a aussi des moments où je suis loin d'être busy, malgré mes réclamations auprès de tout le monde! "Donnez moi du travail!" . Mais avec Momentum OKC 2015 qui arrive à grands pas ça ne devrait plus être tellement le cas.


Et puis la consolation à cette petite frustration c'est que j'apprends beaucoup par l'immersion, je farfouille les informations intéressantes à droite à gauche dans les dossiers pour comprendre comment tout cela fonctionne. Et puis, l'équipe est SU-PER, je n'ai jamais travaillé dans une atmosphère aussi agréable, pas de prise de tête ni de prise au sérieux et je dois bien avouer que cela fait du bien. Je ne sais pas si c'est partout pareil, et j'imagine bien que non, mais en tout cas ma soeur chérie qui a eu la chance de visiter une station de télévision lors de sa venue en Oklahoma, et d'assister en régie et en plateau à l'enregistrement d'un journal, avait eu ce même ressenti : tout le monde est hyper rodé et professionnel, peu de prise de tête, peu de stresse et... ça fonctionne! L'efficacité à l'américaine ?

C'est aussi la première fois que je travaille au quotidien avec un chien qui vient poser sa tête sur mon bureau de temps à autre, ou s'étale pour une petite ronflette au milieu du couloir. Ce bon gros toutou c'est Calib, il a 11 ans et sa maïtresse c'est tout simplement notre directrice arrivée dans la structure depuis octobre, avec son chien adorable qui vient rythmer les après-midi à coup de ronflements et de prouts acides dispersés généreusement ici où là dans les bureaux de chacun.


Ce qu'il y a de nouveau encore, et je terminerai ainsi c'est que maintenant, je rentre facilement dans les galeries. Ce que je ne faisais jamais avant à cause de ce rapport commercial à l'art, préférant me rendre dans les musées. Mais finalement, je réalise ici qu'en arpentant les galeries je vois ce que font les artistes locaux et je me sens bien plus connectée à la réalité de la création artistique locale qu'en allant dans un musée. Disons que l'expérience est différente mais finalement bien plus stimulante et inspirante que j'aurais pu l'imaginer. Il y aurait encore plein de choses à raconter sur mon petit quotidien de stagiaire mais je crois vous avoir donné une idée générale de l'organisation et un petit aperçu de ce qu'il y a de "vraiment différent" ici.


Oh j'oubliais ! Une dernière chose... Quelques mois après le début de mon stage, une collègue m'a proposé de participer à un mentorship que gère l'agence cuturelle d'Etat the Oklahoma Arts Council. Il s'agit en quelques sortes d'un parainage entre jeunes artistes ou professionnels de la Culture et moins jeunes artistes ou professionnels de la Culture plus expérimentés. Ainsi chacun peut, gratuitement, postuler pour se voir attribuer un parrain ou un filleul selon le cas, et cette attribution se fait sur la base d'intérets communs. Ce principe de mentorship se fait beaucoup ici (et plus largement aux Etats-Unis je crois) et je trouve cela génial. Ainsi depuis quelques mois je rencontre de manière très informelle ma mentor qui travaille pour la formation artistique dans cette même agence gouvernementale. Durant nos rendez-vous, nous parlons de nos expériences, elle me donne des conseils, et tout cela autour d'un café dans un endroit sympa. Aussi tous les mois, tous les parrains et filleuils sont invités à se retrouver autour d'un déjeuner pour se rencontrer, créer du réseau aussi, et faire vivre la communauté bien sûr ! Dans tous les cas c'est vraiment un concept intéressant à mon avis, qui permet de partager les différences expériences dans un même domaine, de relativiser aussi et de voir comment c'est ailleurs, au delà du petit monde créé au quotidien entre collègues et autour de missions bien spécifiques dans sa propre organisation.

Come on, let's do that in France!

Et si vous êtes des curieux, allez donc jeter un oeil au site internet : Oklahoma Visual Arts Coalition

Musique: I Will Be Yours, Casey and Minna - groupe originaire d'Oklahoma, qui a joué l'année dernière durant Momentum 2014 et qui a notamment participé au tournage du film Rudderless qui sortira prochainement.

Photo: MOMENTUM OKC 2014, © OVAC, et plus dans la rubrique PHOTOS.

Momentum OKC 2014.jpg

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